Pour seul cortège, Laurent Gaudé

Pour seul cortège, Laurent Gaudé

J’ai beaucoup aimé ce livre qui nous raconte la fin d’Alexandre et - conséquence directe de cette disparition - l’effondrement inéluctable de son empire qui s’effrite dès que s’échappent ses derniers souffles de vie. J’ai bien aimé surtout parce que ce n’est pas un roman historique (j’en ai déjà lu plein sur le sujet) : ici Alexandre n'appairait pas comme un personnage de livre d’histoire mais plutôt comme le mythe qu’il est devenu, l’incarnation même du conquérant, une force vivante, mélange de violence, de beauté et de rêves démesurés. Alexandre le Grand est grand, c’est le moins qu’on puisse dire ! Il a ce petit (énorme) truc en plus qui fait qu’on a envie de le suivre jusqu’au bout du monde, et même mort, sa dépouille déplace des foules et soulève des armées, c’est dire…
Ce roman donc évoque le dernier voyage d’Alexandre, mais pas seulement. Non, un second personnage se taille la part du lion, ou plutôt de la lionne puisqu’il s’agit d’une femme. Dryptéis, fille cadette de Darius (vaincu par Alexandre) et épouse d’Héphestion le plus proche des compagnons d’Alexandre, sera la dernière à accompagner le corps d’Alexandre, elle sera les yeux pour voir, la voix pour raconter et le cœur pour comprendre. Elle qui voulait avant tout fuir l’empire, se retirer du monde et vivre une vie simple avec son enfant loin des tumultes de l’histoire se retrouve malgré elle propulsée dans ce cortège qui conduit même les plus grands vers le dépouillement le plus total. Et finalement, ça lui va bien, on ne pouvait trouver meilleur cortège, elle seule est capable d’entendre et de comprendre la voix d’Alexandre qui s’élève depuis l’au-delà, elle seule pouvait partager ce besoin - cette nécessite - d’échapper enfin à l’empire. Car oui, Alexandre veut échapper aux fastes et aux intrigues perpétuelles de cette cour, il ne veut pas être enterré avec luxe et splendeur, il veut continuer son voyage, franchir d’autres frontières encore et se confondre avec l’immensité de son rêve… Dryptéis va lui offrir tout ça, lui permettre de se libérer de l’empire, elle ira jusqu’au bout et va gagner en même temps sa propre liberté.
Ce roman est porté par le vent de l’âme, il est plein de magie et son écriture somptueuse nous entraîne au cœur de la légende, j’en redemande !


Une p'tite phrase au hasard : 

" Elle aime les lieux où les voix, dans les montagnes, se font avaler par les crevasses et où il ne reste qu'un silence vibrant de lumière."

Quatrième de couverture : En plein banquet, à Babylone, au milieu de la musique et des rires, soudain Alexandre s’écroule, terrassé par la fièvre. Ses généraux se pressent autour de lui, redoutant la fin mais préparant la suite, se disputant déjà l’héritage – et le privilège d’emporter sa dépouille.Des confins de l’Inde, un étrange messager se hâte vers Babylone. Et d’un temple éloigné où elle s’est réfugiée pour se cacher du monde, on tire une jeune femme de sang royal : le destin l’appelle à nouveau auprès de l’homme qui a vaincu son père… Le devoir et l’ambition, l’amour et la fidélité, le deuil et l’errance mènent les personnages vers l’ivresse d’une dernière chevauchée. Porté par une écriture au souffle épique, Pour seul cortège les accompagne dans cet ultime voyage qui les affranchit de l’Histoire, leur ouvrant l’infini de la légende.

Pour seul cortège, Laurent Gaudé

Commentaires