Les filles de Roanoke, Amy Engel
On est bien d’accord, l’antiquité grecque n'a pas le monopole des histoires de famille compliquées, loin s'en faut. Si vous en doutez ou si vous avez besoin d’une piqûre de rappel, Amy Engel se charge de nous en donner une preuve supplémentaire. Pour tout vous dire, au fil des pages je me suis dit : Yates Roanoke / Denys de Syracuse, même combat (à ce propos, petit aparté, j'encourage vivement ceux qui ne connaissent pas le Tyran de Syracuse à lire le magnifique Jardin Forteresse de Claude Pujade-Renaud). Bref.
Dans ce ranch perdu au fin fond du Kansas les filles sont prisonnières tout autant que les filles du Tyran l’étaient dans leur jardin merveilleux (comme tant d’autres filles ailleurs dans tant d’histoires dans tant de pays… mais bon, j’ai pris cet exemple et je vais m’y tenir sinon on n’est pas sorti de l’auberge car c’est une histoire qui se répète depuis que le monde est monde et que l’homme est homme).
Les filles sont prisonnières donc, et le mâle dominant domine (comme son nom l’indique). Le mâle ici, c’est Yates, à la fois frère amant père grand-père oncle - et vous mettez ça dans l’ordre que vous voulez. Ok ? Pas besoin de vous faire un dessin, je pense que vous avez compris.
Je ne fais pas un gros spoil en disant ça (et pardon à ceux qui auraient besoin d’un dessin) car il n’y a aucun suspense sur ce point dans le livre, on le voit venir gros comme une maison depuis le début. Mais ce n’est pas grave car au final le but du jeu ce n’est pas ça et ce roman n’est pas un roman policier. Non, en plus de trouver ce qui est arrivé à Allegra (imaginez, la Lolita avec ses lunettes roses en forme de cœur, c’est bon, vous voyez ?), le propos de l’auteur est plutôt d’évoquer sur fond d’enquête la question délicate et taboue de l’inceste. Et vraiment, je dois admettre qu’elle le fait plutôt bien, sans pathos, sans misérabilisme et sans vulgarité. On en lit plus entre les lignes que sur les lignes, et ça c’est un bon point.
Une malédiction pèse sur ces filles et il n’y a pas trente six manières de sortir de Roanoke, le choix est même plutôt limité : s’enfuir ou… s’enfuir. Certes, la fuite peut prendre différentes formes : fugue, suicide ou folie. Yeah baby, y’a plus qu’à choisir !
Si vous avez envie de savoir les choix faits par les différentes filles Roanoke, lisez le livre. Ce n’est pas un chef d’oeuvre de la littérature, ni un roman transcendant, mais je me pose la question, faut-il toujours être transcendé ? Je ne sais pas. Ce que je sais c’est que c’est une lecture hyper facile qu’on avale le temps d’un rien et qui - somme toute - est plutôt agréable. Dans le jargon des éditeurs, on appelle ça page-turner.
Kesako ? Page turner, non ce n'est pas le fils de Tina Turner (excusez moi j'ai mangé un clown ce matin), c'est écrit au dos du livre et au final je partage assez cette opinion même si d’habitude ce n’est pas le genre de qualificatif qui me fait choisir un livre. Parfois on a envie de manger de la page comme d’autres mangent de l’asphalte et y’a pas de raison de s’en priver.
J’ai reçu ce livre dans le cadre d’une opération Masse critique Babelio en partenariat avec les éditions Autrement et je ne veux pas finir ce billet sans les en remercier.
Une p'tite phrase au hasard :
" Personne n'avait besoin de m'expliquer l'emprise que nos enfances exercent sur nous, même quand nous la combattons corps et âme."
Je suis toujours aux aguets des parutions étrangères d'Autrement. Celui-ci ne m'avait pas particulièrement tenté, mais la façon dont tu en parles... Bref, il me tente bien. Et, à l'occasion, un page turner, ça change!
RépondreSupprimerTu as bien digéré ton clown?
C'est bon j'ai roté le clown. Je peux t'envoyer le livre si ça te dit 😊
SupprimerCertain, que ça me dit! Mais là, je t'envoie un livre en échange (ou deux). Des surprises! On fait ça fin juillet, car je pars un mois en Europe et je ne veux pas que le livre se perde à l'arrivée. Si ça te va comme ça, on en reparle!
SupprimerPas de problème, profite bien de tes longues vacances européennes !
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