La femme qui fuit, Anaïs Barbeau-Lavalette

La femme qui fuit, Anaïs Barbeau-Lavalette

Il y a quelques jours je me perdais dans une faille spatio-temporelle en traînant mes pas dans ma librairie préférée  - que je fréquente à ma grande frustration puisque j’ai décidé depuis plus de 2 ans maintenant de me libérer de la possession de biens matériels et que donc je n’achète plus que très peu de livres, les empruntant de préférence à la médiathèque mais bon ça ne m’empêche pas d’aller fureter en librairie chaque semaine (et cette fois j’ai quand même craqué sur un tout petit Sylvain Tesson) - enfin bref ce n’est pas le sujet. Ce que je veux dire c’est que pendant que je zieutais amoureusement les nouvelles sorties et tout le reste, j’ai entendu une dame qui demandait un conseil lecture à une libraire qui passait par là. Et que lui a-t-elle conseillé ? Je vous le donne en mille, et avez dû me voir venir, oui elle lui a conseillé ce petit livre d’Anaïs Barbeau-Lavalette, La femme qui fuit.
Comme j’avais moi-même achevé cette lecture quelques jours auparavant, j’ai tendu une oreille curieuse (que celui qui n’a jamais fait ça me jette la première pierre). A l’entendre, le livre était émouvant, bouleversant, déchirant, poignant (oui elle en faisait des caisses sur ce registre), racontant l’histoire scandaleuse d’une femme (libérée oui c’est pas si facile) qui abandonne ses enfants pour s’en aller vivre une vie de bohème. Elle (la libraire) dit aussi des trucs comme écriture forte, intense, originale, style qui happe, et enfin, bien sûr, coup de cœur.

Mouais… ben écoutez, je sais pas.... Je n’ai pas vraiment partagé cet enthousiasme débordant, je n’ai pas été envoûtée, retournée, bouleversifiée, pas davantage happée ou transportée, mon cœur n’a pas bondi dans ma poitrine ni n’a été déchiré (heureusement). D’ailleurs, pour en finir avec cette anecdote plus ou moins hors de propos, le cliente a dû se méfier aussi face à cet étalage de superlatifs car elle a dit poliment merci, je prends note, j’achèterai peut être ce livre une autre fois. Bien joué ! Comme quoi ça servait à rien de chanter la pomme.

Pour ma part, j’ai pris ce mini livre suite à un entrefilet lu je ne sais plus où, aussi parce que je l’ai trouvé à la médiathèque juste avant mes vacance et enfin, pour son tout petit format qui m’a permis de le glisser dans ma valise sans risquer de me péter un bras en la portant. Je n’ai pas été spécialement déçue en le lisant parce que je n’en attendais rien de particulier mais je n’ai pas été séduite non plus. Impression mitigée, sentiment d’avoir survolé quelque chose, trop court et trop long à la fois, bref, lecture pas indispensable.
Ce n’est pas que je sois un être froid et dénué de toute sensibilité, au contraire (même si je cache bien mon jeu), ce n’est pas que le thème ne me parle pas (au contraire, je me sens même plutôt concernée par cette question de l’abandon) mais voilà, je n’ai pas réussi à m'intéresser plus que ça à cette histoire et je crois que d’ici peu j’aurai tout oublié de ce livre.

En fait, je sais ce qui a cloché pour moi avec cette lecture : c’est ma méconnaissance du contexte. Oui, je suis passée complètement à côté d’une autre dimension du livre parce que ne connais absolument rien, mais rien de rien (et je le regrette bien) au mouvement des Automatistes québécois, rien du Refus Global non plus. Bien sûr j’ai plus ou moins compris quand même, j’ai imaginé, j’ai pensé un peu au Salon des Refusés en France ce genre de trucs (j’ai quand même fait des études en Histoire de l’Art hein) mais bon, je suis bien obligée d’admettre que je connais rien à ce pays ni à cette période de son histoire. Alors oui, j’ai fais quelques recherches après, j’ai appris que le Refus Global était un manifeste artistique publié en 1948, plutôt libertaire et assez radical, que les Automatistes étaient des artistes issus du Surréalisme qui s'intéressaient aussi à la psychanalyse et enfin, j’ai appris que tout ça se passait pendant la Grande Noirceur et annonçait la Révolution Tranquille au Québec. Vous voyez de quoi je parle ? Non ? Moi non plus pas très bien, j’ai honte, mais par contre je dois dire que j’adore vraiment j’adore ces termes utilisés pour désigner les périodes historiques, vive le modèle québécois !

Ainsi donc, tabarnouche, je crois bien qu’il faut être québécois pour pouvoir appréhender ce livre dans l’ensemble de ses dimensions. Pour être honnête toutefois, je ne peux pas jurer non plus que je l’aurai adoré même si j’avais été au taquet au niveau de la connaissance du milieu artistique et contestataire québécois des années 40 et 50 (mais il est certain que j’aurai trouvé un peu plus d’intérêt à cette lecture). 



Une p'tite phrase au hasard : 

" Tu avales la vie des autres et tu ne sais pas comment construire la tienne." 

Quatrième de couverture : Anaïs Barbeau-Lavalette n'a pas connu la mère de sa mère. De sa vie, elle ne savait que très peu de choses. Cette femme s'appelait Suzanne. En 1948, elle est aux côtés de Borduas, Gauvreau et Riopelle quand ils signent le Refus Global. Avec Barbeau, elle fonde une famille. Mais très tôt, elle abandonne ses deux enfants. Pour toujours. Afin de remonter le cours de la vie de cette femme à la fois révoltée et révoltante, l'auteur a engagé une détective privée. Les petites et grandes découvertes n'allaient pas tarder.

Commentaires

  1. Savoureux billet. Ce roman a fait un tabac, par ici. Je ne l'ai pas lu. Je résiste!
    Tu commences à avoir la parlure québécoise, dis donc! «chanter la pomme», «tabarnouche»...

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    1. Eh oui, tu penses bien ! J'ai fais quelques recherches afin de me rapprocher du sujet ^^ (j'ai trouvé un super site avec les expressions québécoises expliquées, il faut que j'en apprenne quelques unes histoire de ne pas faire trop touriste si jamais j'ai la chance de venir visiter un jour ce pays...)

      http://www.je-parle-quebecois.com/lexique/definition/expression-quebecoise.html

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    2. Remarque qu'il y a tellement de Français dans mon coin (et au Québec en général), que tu ne détonnerais pas avec ton accent! C'est plutôt moi qui détonne lorsque je vais par chez vous.
      T'arrives quand tu veux, je t'accueille avec un immense plaisir!

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    3. T'es vraiment trop gentille, fait gaffe si tu continues à dire ça je risque de vraiment venir !
      Il y a tellement de français ? Je ne vais pas être dépaysée alors. Ils font quoi ? Quel genre de job un français peut venir faire par chez toi ? (Je me renseigne, j'ai une urgence vitale à changer ma vie qui part en sucette)

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