Le mur invisible, Marlen Haushofer

Le mur invisible, Marlen Haushofer

Boiiiiing ! Aïe, ça fait mal ! Me suis pris un mur en pleine face... Invisible en plus, le sournois.
C’est malin, maintenant j’ai le cerveau un peu secoué, d’où la super blague introductive, il faut me pardonner.

Alors voilà, je suis carrément en retard pour écrire ce billet, j’ai déjà deux autres livres dans les dents depuis (décidément, un mur dans la face, deux livres dans les dents, qui a dit que la lecture était un sport non violent ??)

Concernant ce roman de Marlen Haushofer, j’ai eu très envie de le lire suite à mon coup de cœur pour le magnifique Dans la forêt de Jean Hegland lu en février. Les thèmes sont similaires, le monde d’après le monde et la survie dans la forêt. 
Dans les deux cas on ne sait pas trop ce qui s’est passé pour qu’on en arrive là (et finalement on s’en fiche, ce n’est pas important). Dans les deux cas on se retrouve isolé dans une maison au fond des bois. 
Sauf qu’ici la narratrice est seule, et anonyme - on ne saura jamais son nom - ça m’a un peu gêné au début mais après tout comme personne ne lui parle, à quoi bon avoir un nom ? 
Autre différence, elle est enfermée sous une espèce de cloche en verre qui délimite le monde survivant (d’où le titre on l’aura deviné) alors que Nell et Eva pouvaient toujours, si l’envie leur en prenait, décider d’aller voir ailleurs si l’herbe était plus verte. Et ça, ça change pas mal de trucs à mon avis, en tout cas pour moi (on se rapproche plus d’une expérience carcérale que d’une expérience de fin du monde).

Ceci dit, jusque là tout va bien. Enfin, c’est une façon de parler. En réalité, rappelez-moi que je ne veux surtout pas être la dernière personne sur terre ! Pourquoi ? Mais parce que c’est épuisant, mortellement épuisant, on devient esclave de sa survie et on se tue à vivre. Si vous en doutez, lisez ce livre, vous verrez, vous finirez comme moi par avoir des ampoules partout à force de creuser, ratisser, débroussailler, récolter, traire la vache, couper du bois, porter du foin … j’arrête la liste car elle est infinie. En deux mots, derrière ce mur, c’est le bagne.

Le bagne, ou alors le purgatoire. C’est une hypothèse à laquelle j’ai pensé en cours de lecture : en fait, la narratrice serait morte (comme tous les autres) mais - en adoptant une vision chrétienne du monde - elle devait avoir un sacré paquet de choses à se faire pardonner et donc elle doit en chier quelque temps au purgatoire avant de pouvoir rejoindre le paradis des justes. Mouais… ça ne me plaît pas trop comme théorie, je ne partage pas cette vision des choses.

Du coup, autre analyse possible : ce n’est pas le mur qui est invisible, ce sont les gens. Oui c’est vrai, des vies comme ça y’en a plein, des hommes ou des femmes seuls avec leur chat ou leur chien qui se tuent à la tâche au fin fond de leur campagne solitaire juste pour en tirer de quoi survivre. Personne ne leur parle, personne même ne les voit, ils sont derrière un mur invisible. Du coup, Marlen Haushofer ne nous parle plus de survie dans un contexte post-apocalyptique mais de la survie au quotidien de tout un tas d’invisibles qui se démènent pour trois fois rien. Possible aussi.

Ou alors ce mur symbolise les barrières invisibles que l’on se construit parfois et qui nous empêchent d’avancer, de nous épanouir. Ça existe bien sûr, on s’enferme tous parfois dans notre bulle pour ne pas affronter une réalité qui nous blesse, pour se cacher ou pour se guérir.

Bref, comme vous voyez, il y a plein d'interprétations possibles. Je suis contente d’avoir lu ce livre qui donne matière à réflexion, mais j’avoue que je n’ai pas été transportée et que je préfère les vraies histoires de fin du monde ;)


Une p'tite phrase au hasard : 

" Peut-être me suis-je déjà tellement éloignée de moi-même que je ne le remarque même pas."


Quatrième de couverture : Voici le roman le plus célèbre et le plus émouvant de Marlen Haushofer, journal de bord d’une femme ordinaire, confrontée à une expérience-limite. Après une catastrophe planétaire, l’héroïne se retrouve seule dans un chalet en pleine forêt autrichienne, séparée du reste du monde par un mur invisible au-delà duquel toute vie semble s’être pétrifiée durant la nuit. Tel un moderne Robinson, elle organise sa survie en compagnie de quelques animaux familiers, prend en main son destin dans un combat quotidien contre la forêt, les intempéries et la maladie. Et ce qui aurait pu être un simple exercice de style sur un thème à la mode prend dès lors la dimension d’une aventure bouleversante où le labeur, la solitude et la peur constituent les conditions de l’expérience humaine.




Le mur invisible, Marlen Haushofer
Le mur invisible, adaptation cinématographique de Julian Pölsler

Commentaires

  1. Il m'est souvent passé sous le nez sans que je m'arrête. À te lire, avec toutes ces pistes d'interprétation, me voilà très curieuse de le lire.
    Cette piste me parle bien: «ce n’est pas le mur qui est invisible, ce sont les gens.»

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    1. Oui ce n'est pas renversant mais intéressant pour l'interprétation, la piste qui te parle est également ma préférée.

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